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vendredi, juin 02, 2006

PHENOMENOLOGIE DE L'ABSOLU



Toutes les sociétés depuis le début de "L'aventure humaine" ont élaboré une conception propre de l'absolu, c'est à dire plus précisément de la Puissance Absolue. Force impersonnelle et indifférenciée (brahman, mana, wakan, manitou, orenda) dans les sociétés mythiques, au contraire personne souveraine (roi, dieu) dans les sociétés théocratiques différenciées et centralisées (naissance de l'Etat), enfin sociétés démocratiques où la liberté comme principe rationnel universel prend la place de la personne souveraine.

Avant l'avènement du symbolique, l'homme vivait comme un animal inconscient. C'est à dire que la puissance n'était pas représentée. Apparemment, la première représentation de la puissance dont nous pouvons être sùr, ce sont les figures animales dessinées sur des supports divers (blocs, objets quotidiens, parois rupestres). L'homme alors se serait détaché de l'animalité, en se donnant une représentation extérieure à lui-même de l'être. Ainsi l'homme est né. Parce qu'il a occupé une place à l'extérieur de l'image, une place qui n'était plus celle de l'être inconscient.



PETIT TABLEAU :

Société naturelle :
La puissance n'est pas représentée. L'homme vit comme un animal inconscient. C'est à dire qu'il est soumis à la puissance naturelle (pulsion naturelle) sans médiation.

(A cette société correspond un état d'inconscience animale : pas de Division)

Société préhistorique :
La puissance est représentée sous la figure de l'animal, par conséquence l'homme cesse d'en être un. L'homme est identifié au territoire qu'il habite. Il essaye d'arraisonner les animaux qui peuplent ce territoire en les dessinant. Les animaux représentent alors un désir et finalement une puissance. Tout en étant du territoire, ils n'y sont pas attachés : ils sont "automobiles" (cf. l'analyse du petit Hans par Freud et l'angoisse du petit garçon devant le fait que le wagon pourrait se détacher du cheval, ou qui sait son père de la famille ou de sa mère). La puissance apparait donc comme une puissance d'altérité, de désir : négation du Même ou de l'Un-territoire. Par le dessin et quelques pratiques magiques, l'homme cherche à tisser un lien (symbolique) avec l'animal, ou plutôt entre le terrotoire et l'animal. Le territoire est en fait un espace imaginaire. On pourrait dire de la grotte, qu'elle matérialise le Contenant Imaginaire (le territoire). Ici donc la puissance apparait plutôt comme une puissance négative, une puissance d'altérité, de différenciation.

(Il y a une première division : Territoire/Animaux. A cette première division correspond une première conscience)

Société mythique :
La puissance est représentée comme une force impersonnelle (brahman, mana, wakan, manitou, orenda, ect...). Elle est donc pensée dans la dimension propre de l'abstraction (dimension symbolique). Il y a là un fort effort d'abstraction par rapport au stade précédent. Le Contenant Imaginaire n'est plus le Territoire, mais le Cosmos. Mais dans ce cosmos (uniciste), l'homme n'a pas encore émergé comme puissance autonome. La puissance est ici cosmique, englobante, indifférenciée. L'homme habite ainsi un cosmos mythique fondé et construit, une demeure où il a sa place, mais en tant qu'il est "compris dedans", par une sorte de fantasme d'inclusion. Il n'a donc aucune liberté, aucune autonomie réelle.

(Dans cette forme sociale, le cosmos est intégré - cf. Cosmos Intégrated, Dantec. La société mythique est toute entière fondée sur le refus de la division et donc de l'Etat - cf. La société contre l'Etat, Pierre Clastres. Son idéal est la répétition éternelle du même. A la limite, la société mythique est parvenue à forclore la division au prix de l'identification du réel et du symbolique ; chamanisme)

Société théocratique :
La puissance est socialement différenciée et s'incarne dans une personne souveraine (dieu, roi). Naissance de l'Etat. La puissance est intégrée à la société ; elle est socialement représentée. L'homme commence à prendre conscience de son autonomie par rapport au cosmos (d'où l'angoisse du pêché et de la culpabilité : la liberté ouvre la possibilité du mal). Le Contenant Imaginaire n'est plus ici le territoire (S-p), ni le cosmos (S-m), mais la société, c'est à dire l'Etat. L'Etat devient donc le lieu d'incarnation de l'absolu (ou du divin).

(Intégration sociale de la puissance, ce qui produit différenciation et division ; naissance de l'Etat, apparition des classes)

Société démocratique :
La liberté devient le principe rationnel (moral) universel à la place du souverain personnel. Le Contenant n'est plus l'Etat mais l'élément moral universel (langage, pensée, esprit). D'imaginaire, il est devenu symbolique. L'Etat a renoncé à incarner l'absolu. L'absolu est pensé comme pensée. Cela suppose un dépassement du cadre politique de l'Etat, ainsi que le pensait Marx contre Hegel. Sauf que Marx pense le réel à partir du matériel (économie, travail) et du naturel (homme animal). Alors que nous le pensons avec Hegel à partir de l'élément abstrait (esprit). En niant l'esprit, Marx ouvre la voie au totalitarisme.
La liberté s'oppose ainsi au pouvoir politique et en est en même temps le principe générateur : dialectique Liberté/Pouvoir ou Société/Etat.

(La division est intégrée comme dialectique à l'intérieur de l'univers moral ; esprit = liberté)

L'essentiel est que l'absolu soit descendu du ciel sur terre. Mais jamais il ne peut être identifié au pouvoir étatique. L'absolu demeure donc en quelque sorte interdit (tabou). Transgresser cet interdit, c'est nier l'absolu (l'esprit comme liberté) et prendre la voie de la réaction totalitaire.
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